Jean Cocteau...

ou le parisien qui aura marqué le monde artistique du XX° siècle : une figure à la mode du Tout-Paris

Publié le 10/03/2019 à 19 h 30

Auteure : Lucie Bessac

Avant tout artiste aux multiples talents, baigné de poésie dès le berceau mondain où l'on a le goût des arts, Jean Cocteau a été le lanceur de mode du Tout-Paris. Influencé par Proust, Hugo ou Jules Verne, il a toujours rappelé que son travail était avant tout poétique dont ses œuvres artistiques et littéraires en furent l'émanation.

Une enfance agitée d'art :

Né le 5 juillet 1889 au cœur d'une famille bourgeoise de Paris, Clément Eugène Jean Maurice Cocteau, de son nom complet, connaît rapidement une blessure qui le marquera à vie : le suicide de son père de 5 avril 1898. Place Sully, à Maison-Laffitte, il est élevé dans la maison de son grand-père paternel, collectionneur et mélomane. Comme prédestiné, il baigne dans un cocon artistique autour de séances musicales organisées par son grand-père et de magazines de théâtre qui traînent ici et là dans l'immense demeure.

 

À l'école, Cocteau ne brille qu'en dessin. Ses professeurs du collège Grand Condorcet le trouvent intelligent, mais c'est un garçon inégal et agité. Il échoue d'ailleurs à la session du baccalauréat de 1906, année de décès de son grand-père. Le jeune homme est un habitué du café-concert l'Eldorado où il rencontrera l'artiste Jeanne Reynette, avec qui il aura une courte liaison. Des sessions de baccalauréat, il en ratera quatre. Après une fugue à Marseille où son frère ira le chercher, il ne reprendra pas ses études.

 

 

 

Une réputation de dandy

 

Cocteau écrit désormais des poèmes et se prend de passion pour le théâtre, persuadé qu'un grand destin l'attend. Sa mère s'installe seule avec lui, rue actuelle Raymond-Poincaré, dans un logement plus prolétaire. Elle l'introduit dans le « beau monde », où il se fait remarquer pour son élégance propre au XIX siècle. Son ami Édouard de Max organise au théâtre Femina, sur les Champs-Élysées, une matinée poétique consacrée à « un tout jeune poète de dix-huit dans, Jean Cocteau ». Premier grand succès mondain.

 

Jean Cocteau a une activité littéraire intense, il prépare une revue en 1909, publie des articles, des dessins, et en février paraît son premier recueil de poèmes, La Lampe d'Aladin. L'année suivante il fait la rencontre de Proust chez Mme Strauss, la veuve de Bizet. Il sera une grande influence pour le tout jeune poète.

 

Les Enfants Terribles

 

En 1918, Cocteau fait la connaissance d'un jeune poète Raymond Radiguet. Jean sera pour lui d'une très forte influence, comme une sorte de maître. Ensemble ils voyageront et écriront beaucoup. Lors de la mort soudaine de Radiguet en 1923, il se retrouve découragé, désespéré, déclarent certains proches, et développe une addiction à l'opium. Sa dépendance et ses efforts pour s'en délivrer marqueront sa production littéraire. Il écrit d'ailleurs Les Enfants Terribles, son œuvre la plus connue, en une semaine lors d'une difficile période de sevrage, état de manque de l'opium.

 

L'histoire de ce livre vient de sa relation avec les Bourgoint. C'est à Villefranche-sur-Mer qu'il fait connaissance de la famille, composée de trois enfants. Ils se fréquentent jusqu'en 1929, date du suicide d'une des filles, Jeanne, qui laissera son frère désemparé. C'est de leur vie qu'est inspiré le livre Les Enfants terribles,  immense succès, même après la mort de l'écrivain.

 

Le couple Jean Cocteau et Jean Marais

 

Les deux Jean forment un couple d'amants terribles. Cocteau est tombé sous le charme de ce jeune homme de 23 ans, au profil grec et à l'allure athlétique. Avant-guerre, ils goûtent tous deux au bonheur de leur liaison sous le soleil de Saint Tropez: le film L’Éternel Retour  évoquera cette passion sur un coin de sable, quand Marais se sera éloigné de Cocteau.

 

Leur liaison finira par s'évanouir, Jean Marais est mobilisé en 1939, pas l'autre Jean. Cette séparation est vécue comme une terrible déchirure.

 

« Je sais maintenant le mal dont je souffre et que je traîne : c'est toi. C'est vivre sans toi. »

 

L’Apollon finira par se lasser, cherchera ailleurs des relations fougueuses. Quant au poète, il se réfugiera dans les bras d'une grande dame, la mécène française Francine Weisweiller, déjà mariée. C'est dans sa villa à Santo Sospir que l'artiste commence par dessiner sur les murs blancs, d'abord un Apollon au-dessus de la cheminée du salon. Encouragé par Matisse, il décorera ensuite toute la villa de tapisseries inspirées de la mythologie grecque ou de la Bible.

 

Creds : Lido/Sipa
Édith Piaf et Jean Cocteau à l'époque de leur rencontre, en avril 1940.

Vingtième siècle caméléon :

 

En 1940 Cocteau écrit une pièce à succès pour Edith Piaf, Le Bel Indifférent. Il va même travailler au côté de Coco Chanel et Picasso. Ouvertement homosexuel, il aura toutefois quelques aventures compliquées avec des femmes et sa lutte contre son addiction à l'Opium occupera une grande partie de sa vie d'adulte. Référence cinématographique, il préside le Festival de Cannes de 1953 puis de 1954. Il tourne Le Testament d'Orphée grâce à François Truffaut en 1960.

 

En octobre 1963, il apprend le décès de son amie Edith Piaf. Cocteau est pris d'une violente crise cardiaque à laquelle il succombe. Le poète avant tout, s'éteint à 74 ans. Il est inscrit sur sa tombe: «Je reste avec vous ».

 

 « [..] son cœur a flanché. Il aimait beaucoup Edith mais je ne pense pas que ce soit la mort d'Edith qui ait provoqué la mort de Jean. » Jean Marais